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Rodriguez, artiste peintre

lundi 29 septembre 2008, par formentera


Germàn Rodriguez

artiste peintre

Le Diaporama

"De métaphores et de Miroirs"

« ...Face à ces œuvres, je ne me sens pas abandonné, comme cela m’arrive souvent dans d’autres expositions d’art contemporain.

Pour moi, sa métaphore est claire et limpide. Par une heureuse coïncidence, en même temps que je regarde les toiles de German, passe Bitches’ Brew de Miles, et un courant irrésistible me pousse à les parcourir comme je parcours la musique.

German m’invite, c’est l’écho de la musique de Miles qui me dit viens, continue, yeah, like that, qui me prend par la main et m’emmène à travers ses peintures, me présentant des autels et des sacrifices précolombiens dans Symbols, âmes aztèques qui, à travers la fumée, arrivent aux Dieux, Dieux sévères et mécontents que les morts n’apaisent pas. Ou ces démons cachés dans Abîme, fantômes tourmentés qui me tourmentent et qui me font peur, qui me racontent qu’au-delà il n’y a pas de paradis, que l’abîme est profond et obscur. Et je demande à German, c’est comme ça l’abîme ?

Il dit qu’il ne sait pas, qu’il ne veut pas expliquer son art, que ses tableaux doivent se défendre par eux-mêmes.

Je sais qu’il sait, je sais qu’il connaît l’abîme, je sais qu’il a traversé la solitude et le désespoir, je sais qu’il s’est donné en sacrifice, mais, par modestie ou par jeu, il ne veut rien m’expliquer parce qu’il ne veut pas se donner en spectacle, le spectacle est devant nous dans ses toiles, il ne veut rien m’expliquer parce qu’il veut que je joue son jeu, m’abandonner à sa peinture.

Alors je joue le jeu et j’interprète la métaphore, j’invente des histoires. Des histoires peut-être délirantes, peut-être même démentes, mais qui sont aussi valables que n’importe quelle autre, que celle qu’il s’est raconté pendant qu’il peignait, que celle que n’importe quel spectateur se raconte en observant. Voilà le jeu de son œuvre, on réveille ses sens et on se raconte des histoires, on se laisse embarquer par les couleurs et les formes, s’émouvoir, comme je l’ai fait devant cette arche, ce triangle gris et ocre, cette forme avortée qui, à mon sens, domine Fusion et qui, sans que je comprenne pourquoi, me parla et me donna envie de pleurer, des larmes de joie ou de tristesse, je ne sais pas, mais des larmes quand même, des larmes confirmées par mes frissons et par cette sensation à l’intérieur, comme un vide entre mes poumons et mon estomac, comme si mon diaphragme allait exploser.

Et je me demandai ce qui m’arrivait, j’analysai le tableau et je vis que, lui aussi, il pleurait, car la peinture, comme du mascara, tombait de cette forme étrange, et je crois que je compris. Le tableau me parlait. Le tableau pleurait et, à mon insu, me racontait ses douleurs et ses joies et me disait sens-moi et en le sentant, j’eus envie de pleurer.

Sens-moi, disent les tableaux de German.

German, dis-je, et non pas Rodriguez, car quand j’observe ses tableaux, il n’y a pas de distance, pas de barrière ; il y a de l’amitié, une amitié admirative mais aussi profonde qui me permet de l’appeler par son prénom, comme je le ferais avec Miles. Parce qu’avec lui, je communique et, devant ses toiles, elles et moi nous discutons d’égal à égal. Car, bien que nous nous racontons des histoires différentes, nous avons senti la même chose, nous avons senti que la réalité est chaos, et nous avons essayé de l’ordonner dans des descriptions qui peuvent sembler abstraites, qui peuvent ne pas avoir de sens, mais desquelles se détachent toutes ces sensations que nous avons tous expérimentées : cette anxiété face à l’aube naissante, cette nébuleuse apaisante née du souvenir d’un rêve ou cette révélation mystique au sein d’un bois obscur.

Si les tableaux de German me touchent, c’est parce qu’en eux je me souviens de ces émotions déjà vécues et parce qu’ils me les décrivent peut-être bien mieux que je ne pourrais le faire. Ces tableaux sont comme une odeur qui me submerge et me plonge dans des souvenirs chargés d’émotions, comme un parfum particulier me ramène à la douceur des bras de ma mère.

Structure réveille en moi cette incompréhension anxieuse qui m’envahit lors de mes promenades dans les grandes villes, lorsque je me retrouve devant les gigantesques structures de notre époque, ces autoroutes insensées, ces voies ferrées entremêlées, ces gratte-ciels éblouissants, ces constructions magnifiques qui me font penser que l’homme est grand. Mais ces constructions chaotiques aux pieds d’argile me font peur et me crient que c’est peut-être trop, que nous allons tomber. Face à l’œuvre de German, je sens et je rêve, mais je réfléchis aussi sur mon monde. Pour moi, c’est ça l’art.

Et j’imagine German travaillant dans son petit atelier de Paray-Vieille-Poste dans la banlieue parisienne ; peindre tous les jours avec discipline, lancer de grands traits enflammés, gratter la peinture avec sa spatule irritée, étendre de douces textures avec son chiffon, dessiner des lignes avec ses doigts.

Et je me dis que, probablement, face à ses tableaux, nous n’éprouvons pas les mêmes sentiments et nous ne nous racontons pas les mêmes histoires car, en fait, ses peintures sont des miroirs, des reflets de ce que nous avons à l’intérieur de nous-mêmes. Des miroirs. Pour moi, c’est ça le grand art.

Mais, en même temps, je ne peux m’empêcher de sentir la douceur de ces textures blanches, ces vapeurs apaisantes qui calment un peu cette rage, cette anxiété et cette force qui émanent de ses tableaux, et, alors, je vois dans le reflet, par-dessus mon épaule, la silhouette de German. German, ce créateur qui était là depuis le début de ma confrontation à la toile, ce guide qui m’accompagne pendant cette analyse de moi-même dans le miroir.

Jacques Toulemonde Vidal Paris, 2007  »

site :

contact : german.rodriguez@wanadoo.fr


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